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M-Pesa : le pionnier mondial du mobile money face au défi de l’expansion francophone

Créé en 2007 par Safaricom (filiale de Vodafone) au Kenya, M-Pesa est le service qui a révolutionné la finance mobile en Afrique et inspiré tout un continent. En transformant le téléphone en portefeuille électronique, il a permis à des millions de personnes d’accéder pour la première fois à un service financier moderne. Aujourd’hui, M-Pesa domine toujours le marché kényan, s’étend en RDC via Vodacom et a fait son entrée en Côte d’Ivoire, cherchant à s’imposer dans des environnements francophones où Orange et MTN occupent déjà une place prépondérante.

 

Un géant enraciné dans le quotidien

Au Kenya, M-Pesa est plus qu’un service : c’est une véritable infrastructure nationale. Utilisé par plus de 90 % des adultes, il est devenu un réflexe pour payer les factures, transférer de l’argent, acheter du crédit, régler ses impôts ou même accéder à des services de santé. L’impact est tel que de nombreux économistes considèrent que M-Pesa contribue à plusieurs points de pourcentage du PIB kényan chaque année.

En RDC, le service s’appuie sur Vodacom, qui déploie M-Pesa dans un marché extrêmement concurrentiel. Il y côtoie Orange Money, MTN Mobile Money et Airtel Money, chacun se disputant les usagers urbains et ruraux. En Côte d’Ivoire, M-Pesa tente de s’implanter face à Orange et MTN, en misant sur sa réputation internationale et sur des produits innovants comme l’épargne mobile et le micro-crédit.

 

La confiance comme avantage compétitif

La réussite de M-Pesa repose sur la fiabilité et la simplicité de son modèle. Dès le départ, Safaricom a conçu un service facile à utiliser, même pour les populations peu alphabétisées, via un menu USSD simple et des retraits/dépôts auprès d’agents.

M-Pesa bénéficie aussi d’une image d’innovation responsable. En lançant des produits financiers complémentaires comme M-Shwari (micro-crédit et épargne mobile) et KCB M-Pesa (services bancaires intégrés), il a prouvé sa capacité à évoluer au-delà du simple transfert. Cette diversification lui donne un avantage par rapport à certains concurrents francophones encore centrés sur le transfert et le paiement basique.

Enfin, M-Pesa inspire confiance car il est fortement régulé et adossé à des institutions bancaires partenaires, ce qui renforce sa crédibilité.

 

La poussée des nouveaux concurrents

Si M-Pesa reste dominant au Kenya, sa conquête de marchés francophones est semée d’embûches.

  • En RDC, il affronte trois géants : Orange Money, MTN Mobile Money et Airtel Money. La bataille se joue sur la densité d’agents, la politique tarifaire et la capacité à séduire les commerçants.
  • En Côte d’Ivoire, le duel est frontal contre Orange, leader historique, et MTN, qui dispose d’une forte base d’utilisateurs. Ici, M-Pesa reste encore un challenger.
  • Même au Kenya, de nouvelles fintechs et banques digitales cherchent à capter une partie de son marché, notamment sur les segments de crédit et d’épargne.

La compétition oblige M-Pesa à maintenir une innovation constante, mais aussi à adapter son modèle à des environnements où la régulation, la culture des paiements et les habitudes diffèrent du Kenya.

 

Les fintechs locales : entre innovation et zones d’ombre

Dans les pays francophones où M-Pesa s’implante, des fintechs locales émergent pour compléter ou concurrencer son offre. En RDC comme en Côte d’Ivoire, des agrégateurs de paiement simplifient la vie des commerçants en acceptant plusieurs solutions (Orange, MTN, Airtel, cartes bancaires) via une même plateforme.

Ces start-ups innovent, mais elles sont souvent confrontées à des problèmes de financement, de gouvernance ou de dépendance à des partenaires internationaux. Pour M-Pesa, leur présence constitue à la fois une opportunité de partenariat et une pression concurrentielle supplémentaire.

 

Pourquoi M-Pesa garde l’avantage

Trois facteurs permettent à M-Pesa de rester une référence, même face à des acteurs puissants :

  1. Son statut de pionnier : il a prouvé au monde entier que le mobile money pouvait fonctionner à grande échelle, ce qui lui confère un capital de confiance unique.
  2. Son portefeuille de services étendu : avec des produits comme l’épargne, le crédit et l’assurance mobile, il va au-delà du simple transfert d’argent.
  3. Son adossement à Safaricom et Vodafone : deux groupes disposant d’une expertise et de moyens financiers conséquents pour soutenir son expansion.

 

Un avenir disputé

Pour réussir en Afrique francophone, M-Pesa devra relever plusieurs défis :

  • Adapter son modèle : ce qui fonctionne au Kenya n’est pas toujours transposable en Côte d’Ivoire ou en RDC, où les usagers sont habitués à Orange et MTN.
  • Répondre à la pression tarifaire : des acteurs comme Wave ont habitué les consommateurs francophones à des frais très réduits.
  • Convaincre les régulateurs : les autorités de l’UEMOA et de la BEAC sont de plus en plus strictes sur la conformité et la traçabilité des flux financiers.

 

Conclusion : le pionnier face au test francophone

Au Kenya, M-Pesa reste le service de mobile money par excellence, véritable colonne vertébrale de l’économie nationale. Mais en RDC et en Côte d’Ivoire, il doit encore s’imposer face à des concurrents déjà solidement établis.

Son avantage demeure sa réputation mondiale, son expérience éprouvée et sa capacité d’innovation. Toutefois, sa conquête des marchés francophones dépendra de sa faculté à adapter son modèle kényan aux réalités locales et à rivaliser sur les prix et l’accessibilité.

En somme, M-Pesa est encore le pionnier incontesté, mais son avenir francophone se jouera dans sa capacité à devenir un acteur enraciné et non plus seulement un symbole.

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